Le blanc dans le jardin

Comment, l’architecte paysagiste le conçoit-il?

 

QUELLE EST LA SYMBOLIQUE DU BLANC ?

Le mot « blanc » a ses racines en Allemagne avec l’adjectif « blank » qui se traduit par « brillant » ou « nu ».

Le blanc est souvent lié en poésie à l’aube et donc à l’Est. L’aube, qui vient lui-même de « alba » en espagnol et qui signifie « blanc ». Le blanc peut ainsi être considéré comme un commencement.

Le poète Charles Van Lerberghe juxtapose l’aube et le blanc en en les liant à la rêverie :

« L’aube blanche dit à mon rêve : 

Éveille-toi, le soleil luit.

Mon âme écoute, et je soulève

Un peu mes paupières vers lui.

… »

Par ailleurs, le blanc est lié à de nombreux concepts sacrés dans toutes les religions dont la pureté dans la culture occidentale.

 

Pour un autre poète, Rimbaud, les lettres portent des couleurs. Il associe le blanc à la lettre « E ». La lettre E est la voyelle la plus utilisée dans nos écrits, parfois muette, parfois sonante, elle est omniprésente.

Dans la même veine, il n’est pas considéré comme une couleur, résultant de l’addition de toutes.

 

COMMENT CONCEVOIR UN JARDIN BLANC

Dans l’art des jardins, contrairement au paragraphe précédent, le blanc est définitivement une couleur, agissant activement sur notre regard.

Ce dernier se porte naturellement vers le noir ou le sombre afin de se reposer. Ainsi, le blanc n’attire pas le regard mais le repousse, le fait basculer ou rebondir.

Le blanc est donc un « orientateur » du regard.

Dans un jardin multi-chrome (avec plusieurs couleurs différentes), il est le liant, le pacificateur entre des teintes très dynamiques ne présentant de prime abord aucune harmonie entre elles. Par exemple, un blanc nacré ajouté à une pointe de rouge vif entouré d’un rosé, finalise l’appel au calme et donne toute sa superbe au rouge.

Les jardins monochromes « blancs » quant à eux nécessitent une extrême délicatesse dans leur conception et la sélection de la palette végétale. L’architecte paysagiste doit prendre en compte lors de son utilisation son exposition. 

A l’ombre, un blanc pur est merveilleux, frais et éclairant. Au soleil, il peut être désagréable devenant trop brillant. Dans la création de jardin nous travaillons alors avec des blancs nuancés en harmonie avec les teintes dominantes du jardin.

Ainsi, on comprend qu’un jardin purement monochrome peut se figer et être sans saveur. Il faudra toute la subtilité de la conception pour apporter des variations avec une corolle légèrement rosé ou un ligne bleuté sur un pétale. Alors le tableau végétal s’anime.

 

Les illustrations de l’impact optique du blanc

La robe blanche de cet âne grec nous projette dans le bleu de la Méditerranée

Le même effet avec ces roches

QUELLES INTERPRETATIONS DU JARDIN BLANC DANS NOS CONCEPTIONS ?

 

En tant qu’architecte paysagiste nous apportons notre sensibilité et notre expérience dans l’étude de votre jardin pour un aménagement réussi et ce d’autant plus dans un jardin blanc !

Voici des jeux de feuillages, de fleurs……

Un jardin blanc peut ce décliner selon toutes les envies, du jardin anglais, au jardin de curé jusqu’au jardin naturel plus libre et sauvageons.

Voici la présentation de quelques-uns afin d’imager nos propos de concepteurs de jardin.

QUELS SONT LES JARDINS BLANCS CELEBRES ?

 

Le plus célèbre des jardins blancs est celui de Sissinghurst Castle en Angleterre dans le Kent.

Crée dans les années 30, parmi de nombreux jardins thématiques au sein du château, par Vita Sackville West et son mari Harold Nicolson, il fait figure de « pop-star » étant de toutes les visites de jardins anglais et est même au cœur d’une intrigue dans un polar de Stéphanie Barron. 

Ce jardin blanc à l’origine composé uniquement de roses s’est transformé dans les années 50 avec une composition intégrant des glaïeuls, des iris, des dahlias et des anémones, tous blanc bien sûr. Seuls le vert, le gris et l’argenté étaient utilisés en complément du blanc pour créer une vie. Vita Sackville West a compris que dans un jardin monochrome, ce qui comptait alors, au-delà de la couleur, étaient la géométrie, les formes et les textures des végétaux et plus particulièrement des feuillages. Le jardin repose sur une structure d’arbustes composée d’ifs et de buis offrant un écrin sombre duquel jaillit le blanc.

Dans ce jardin blanc monochrome en floraison, l’intérêt pour l’œil est généré par le contraste entre les arbustes et la composition de vivaces et de bulbes.

Également en Angleterre, un jardin blanc a vu le jour en mémoire de Lady Diana, au sein de Kensington Palace

 

Inspiré des robes de la princesse de Gales, ses intentions paysagères sont de susciter la joie, l’exubérance et le rayonnement. Des roses blanches Desdemona légèrement rosées laissent leur parfum d’exhaler. La conception intègre des graminées modernisant l’image du jardin anglais. Des némésias, plantes annuelles voire semi-vivaces pour certaines, originaires d’Afrique du Sud, parfument la promenade. Enfin, l’annuelle Amni majus complètement l’ensemble en faisant naitre un jardin plus contemporain avec un nuage vaporeux vert et blanc tout en subtilité.

En France, les Jardins de Valloires conçus par Gilles Clément offre également un jardin blanc.

 

Ces jardins botaniques et paysagers sont situés en Picardie sur les terres d’une ancienne abbaye cistercienne. 

Le jardin blanc est structuré par avec toutes les strates végétales à floraison blanche; arbres, arbustes, vivaces et annuelles. Ils évoquent l’appellation de moines blancs donnée aux cisterciens qui occupaient l’abbaye.

Une allée merveilleuse de cerisiers japonais, prunus Shirotae Mount Fuji, à grandes fleurs blanches, doubles et parfumée se parent d’une floraison début avril. Les pétales virevoltent telle une neige poétique pour le plus grand bonheur des photographes.

Également dans le Sud de la France, le Jardin blanc d’Eyrignac.

Au coeur des jardins d’Eyrignac, connu pour ses 300 buissons taillés en topiaire et son tracé classique, il existe également un jardin blanc crée en l’an 2000. Il est conçu tel un dialogue avec le Jardin Français. Ainsi, la conception mêle perspectives et arbustes taillés en topiaires telles des sculptures. 

Un jeux de cinq bassins aux charmantes grenouilles met en scène l’eau tout en insufflant la vie.

En tout cinq cent rosiers ont été plantés. Deux variétés ont été sélectionnées pour leur qualité de résistance et de floraison en continue ou remontante : le rosier Opalia et le rosier Madame Alfred Carrière. Ainsi, le jardin s’épanouit avec un coté féérique à partir dès fin mai jusqu’au premier refroidissement.

Les fleurs blanches composant la palette végétale sont :

  • Rosier
  • Hibiscus
  • Jacinthe
  • Tulipe
  • Narcisse
  • Impatiens de Nouvelles Guinée
  • Sauge
  • Gaura
  • Cléome
  • Dahlia

Pour contraster l’ensemble, une perspective donne à voir une pergola aux lignes japonisantes d’un rouge éclatant qui s’ouvre sur le grand paysage de la Dordogne. La vue est magnifique.

Aux Etats-Unis, une interprétation contemporaine et naturelle du jardin blanc par Piet Oudolf

Concepteur de jardin néerlandais influent, Piet Oudolf a végétalisé la fameuse Highline de New York. Originellement pépiniériste, il est également l’auteur de nombreux ouvrages sur les jardins dits « naturels ». Il est une figure de proue du mouvement « New Perennial »

Dans le Massachusetts, sur l’ile de Nantucket, Piet Oudolf a sélectionné la palette végétale d’un parc de client de particulier de 2.5 hectares. 

Au printemps, le blanc domine certaines zones. Des parties engazonnés laissent émerger des espaces directement inspirées des prairies américaines emplies de vivaces. Des végétaux sélectionnés parmi les essences locales comme l’aubépine ou la viorne, ont été sélectionnés. Les graminées, molinia et sporobolus, ont la part belle mettant en valeur les floraisons et à profit le vent très présent sur l’ile pour dessiner des mouvements ondoyants.

Le jardin blanc peut également être traité de manière naturelle et contemporaine, rappelant les grandes prairies naturelles.